Ce 25 mars, l’Equal Pay Day est organisé dans plusieurs villes de France par BPW, une ONG qui veut mobiliser contre les inégalités salariales femmes-hommes. Cette journée prend un relief particulier cette année, à la lumière de la nouvelle loi censée réduire les écarts salariaux dans un délai de trois ans.
L’Equal Pay Day pourrait-il bientôt perdre sa raison d’être en France ? Pas sûr. Avec l’entrée en vigueur de la Loi pour choisir son avenir professionnel, le 1er mars dernier, les entreprises doivent certes mesurer les écarts de salaires entre les hommes et les femmes, publier ce chiffre, et prendre des mesures pour réduire l’écart en trois ans. » C’est une première mondiale car il y a maintenant une obligation de résultat « , admet Agnès Bricard, présidente de Business Professional Women (BPW) France, qui organise ce lundi 25 mars la 11ème édition française de l’Equal Pay Day. Mais un premier » couac » a été identifié ce matin par le quotidien Les Echos. Il concerne un décret en préparation qui permettrait de repousser le délai de six mois dans lequel certaines entreprises devraient se mettre en conformité avec la loi, après avoir reçu une injonction de l’Inspection du Travail.
De quoi démontrer que l’Equal Pay Day, destinée à faire connaître et à dénoncer les inégalités salariales femmes-hommes, à une date qui diffère d’un pays à l’autre, a toujours sa raison d’être. Après l’Allemagne (18 mars), elle a été fixée cette année au 25 mars pour la France, ce qui signifie qu’il faut cinquante-neuf jours de travail supplémentaire aux Françaises pour atteindre la rémunération moyenne des hommes, à compétences égales et à poste de valeur égale. Ce calcul théorique, basé sur l’indice national de l’Insee qui fait apparaître un écart de revenu salarial de 23,7% en 2018, signifie que l’année professionnelle des femmes ne se terminera que le 25 mars. Une symbolique très anglo-saxonne, mais aussi très parlante.
Cette journée d’action annuelle a été lancée en 1988 aux Etats-Unis, avec la campagne du » porte-monnaie rouge » symbolisant le découvert bancaire, à l’initiative de BPW. L’association créée en 1919 par l’avocate américaine Lena Madesin Phillips est aujourd’hui une ONG qui possède un statut consultatif auprès de l’ONU et fédère environ 30 000 adhérentes dans une centaine de pays. Au programme pour l’édition française de ce 25 mars, l’organisation de conférences sur les négociations salariales à Lyon, et diverses manifestations sur la place des femmes dans les arts et la culture à Paris.
Des sanctions dans trois ans seulement
» Ces inégalités sont inacceptables « , rappelle Agnès Bricard, qui promet de suivre de près l’application des pénalités financières prévues par la loi Pénicaud. La présidente de BPW France, également fondatrice du cabinet d’expertise comptable Bricard Lacroix et Associés et de la Fédération Femmes Administrateurs, se réjouit des progrès que pourrait susciter la nouvelle loi, imitée par la Belgique ( » mais sans pénalités « , souligne-t-elle) et dont l’Allemagne pourrait aussi s’inspirer. Mais elle en perçoit déjà certaines limites, en particulier dans le calcul des » points » qui doivent permettre de mesurer le degré d’inégalité salariale dans chaque entreprise, et dans le fait que seules celles affichant une note inférieure à 75 seront sanctionnées. » Il aurait fallu fixer cette note à 100, car le système mis en place permettra à des entreprises qui n’auront pas vraiment réduit les inégalités d’échapper aux sanctions « . Une demi-mesure qu’elle compare à la loi Copé-Zimmermann sur les quotas dans les conseils d’administration : » Pourquoi avoir fixé la parité à 40% de femmes, et non à 50% ? »
Autre difficulté, le fait que les sanctions ne commenceront à tomber que dans trois ans, le temps donné aux entreprises pour réduire les écarts. » Est-ce qu’on pourra les réduire en trois ans ? s’interroge Agnès Bricard. Je crains qu’il reste encore entre 3% et 8% de différence « . Mais surtout, à ses yeux, ce qui n’est pas du tout réglé, c’est la dérive de ces inégalités qui » atteignent 40% en fin de carrière » avec un impact catastrophique sur le niveau des retraites des femmes. La présidente de BPW France a été consultée sur le sujet par Jean-Paul Delevoye, le Haut-commissaire à la réforme des retraites. Elle propose une piste : » élargir la possibilité de cotiser pour des emplois à temps partiel comme s’ils étaient à temps plein, aussi bien pour l’employeur que pour le salarié « . Là encore, les femmes auront intérêt à rester vigilantes sur la réforme en cours.
Transmis par :
Alain Cloche Consultant Indépendant
VIGIE Voltaire – Veille Informationnelle et Gestion de l’Intelligence Economique – Membre du SYNFIE